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Hôtels résidentiels

Hôtel résidentiel “Westzeedijk” à Rotterdam, Frans Lourijsen, architecte, 1928-1930

Émergence d’un programme

Entre 1928 et 1930, l’architecte Frans Lourijsen (1889-1934) construisit à Rotterdam, aux numéros 126-128-130 de la rue Westzeedijk, un immeuble d’appartements d’un genre particulier, qu’il avait toutefois déjà expérimenté à La Haye, quelques années auparavant.

La particularité de la typologie, alors proposée aux habitants aisés de Rotterdam par l’architecte et le maître de l’ouvrage, la N.V. Nederlandsche Flatbouw Maatschappij 1, résidait dans la conception d’un immeuble combinant des appartements équipés individuellement et des installations centrales communes ; la vie dans cet immeuble offrait encore à ses résidents des services partagés. Un exposé du mode d’habiter proposé – alors nouveau aux Pays-Bas – ainsi que l’explication technique de cette construction furent donnés par l’architecte et le maître de l’ouvrage, lors d’une présentation du projet qui eut lieu dans la soirée du 10 janvier 1928, devant les membres de l’association Rotterdamsche Kring 2. Pour mieux faire connaître ce projet à la population locale, une petite exposition de dessins relatifs à cet immeuble d’appartements se tint, dans les locaux de l’association, rue Eendrachtsweg, durant les jours qui suivirent cette allocution 3.

La carrière de Frans Lourijsen reste peu connue ; son activité de concepteur demeure essentiellement documentée par quelques publications de l’époque 4 (spécialisées ou non). Il a été essentiellement actif dans la construction résidentielle durant la période de l’entre-deux-guerres et occupe, à ce titre, une place particulière dans la conception d’immeubles que l’on pourrait nommer : hôtels résidentiels.

Les débuts de la vie professionnelle de Frans Lourijsen sont liés à celle de son compatriote, l’architecte Jan Wils (1891-1972), avec lequel il réalise quelques immeubles 5. Comme Jan Wils, Frans Lourijsen sera membre de l’association Haagse Kunstkring [Cercle artistique de La Haye], fondée en 1891 par le peintre Théophile de Bock (1851-1904) ; parmi les architectes 6 membres de ce cercle, nous pouvons citer, pour les plus célèbres : Hendrik Petrus Berlage (1856-1934), Co Brandes (1884-1955), Hendricus Theodorus Wijdeveld (1885-1987) ou encore Johannes (dit Jan) Duiker (1890-1935) qui ont réalisé, au tournant du XXe siècle, quelques édifices ayant marqué l’histoire de l’architecture, aux Pays-Bas, mais aussi au-delà.

Maquette de l’entrée du numéro 128 de la rue Westzeedijk (source : revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928)

Dans ce pays, au début du XXe siècle, émergent deux Écoles, renvoyant, chacune, à des écritures architecturales – comme à des approches de l’architecture – distinctes, malgré l’emploi du matériau commun qu’est la brique, alors matériau de construction national : l’Amsterdamse School [École d’Amsterdam], imprégnée de l’idéal socialiste et influencée par l’expressionnisme, dessinera des œuvres aux lignes souples, parfois organiques, agrémentées d’éléments décoratifs, tandis que la Nieuwe Haagse School [Nouvelle École de La Haye] optera pour une voie passant par le fonctionnalisme et le rationalisme et produira des œuvres de formes cubiques, aux lignes essentiellement droites. Les influences de cette dernière empruntent, par l’entremise d’Hendrik Petrus Berlage, aux expériences de l’architecte américain Frank Lloyd Wright (1867-1959). Frans Lourijsen – comme d’autres architectes du cercle artistique Haagse Kunstkring – appartient à la Nieuwe Haagse School et quelques-uns de ses bâtiments seront considérés comme significatifs du renouveau architectural du siècle naissant en étant, par exemple, cités dans la publication en série Moderne Bouwkunst in Nederland [L’architecture moderne aux Pays-Bas], dirigée notamment par Hendrik Petrus Berlage 7.

À La Haye, au début du XXe siècle, la construction des hôtels résidentiels 8 – dotés des équipements techniques, ainsi que des éléments du confort, les plus modernes de l’époque – permit aux architectes de la Nieuwe Haagse School , comme Jan Wils et Frans Lourijsen, d’exprimer une écriture architecturale radicale et d’expérimenter une typologie se détachant alors des habitations traditionnelles ; ces hôtels résidentiels semblant se présenter comme une alternative urbaine à la villa.

Repérage de quelques hôtels résidentiels à La Haye

Dès la fin de la Première Guerre mondiale, ce type d’immeubles aux équipements mutualisés, acquit, dans cette ville côtière de la mer du Nord, une popularité croissante qui gagna jusqu’aux classes moyennes. La forte pénurie de logements, qui sévissait alors, ainsi que le coût du personnel domestique ne furent probablement pas étrangers à cet engouement. Le niveau de confort alors offert aux locataires : chauffage central, cuisine centrale, eau chaude courante, téléphone, ascenseur, garage, etc., de même que les emplacements choisis pour ces constructions : à proximité de la mer, des parcs, ou du centre urbain, généralement desservis par le réseau des transports en commun – critères qui furent toujours déterminants pour l’établissement de ces projets – suffirent à emporter l’adhésion de certains habitants de la ville de La Haye.

En 1930, selon un prospectus de la société Nederlandsche Flatbouw Maatschappij 9, cinq hôtels résidentiels, conçus par l’architecte Frans Lourijsen, avaient, d’ores et déjà, été financés par cet établissement : à La Haye, l’immeuble situé à l’angle des rues Jozef Israëlsplein, Jozef Israëlslaan, Mauvestraat 10, construit en 1925-1926 ; l’immeuble sis 38-72, rue Mesdagstraat, conçu en 1925 ; l’immeuble Duinzicht (numéros 1-27, rue van Zaeckstraat), construit en 1928 ; l’immeuble sis 56-60, rue van Hogenhoucklaan, construit en 1930 ; et, à Rotterdam, l’immeuble implanté le long de la rue Westzeedijk (numéros 126-130).

La construction de ce dernier immeuble, dans cette ville portuaire, semble faire de lui une exception dans la production de cette typologie résidentielle davantage développée à La Haye qu’à Rotterdam. Pour autant, l’organisation générale de cette construction, ainsi que son implantation entre deux grands espaces paysagers : le domaine de la famille van Hoboken, au nord (Land van Hoboken), et le jardin historique Schoonoord, au sud (Historische Tuin Schoonoord), l’inscrivent dans la même logique que celle qui a prévalu pour les immeubles édifiés à La Haye.

L’hôtel résidentiel Westzeedijk

L’immeuble conçu en 1928 par Frans Lourijsen à Rotterdam s’étire sur près de 68 mètres, le long de la rue Westzeedijk où il s’inscrit entre deux immeubles existants de hauteurs et d’alignements sur rue différents. La composition cubique de l’extrémité est de la construction, en proposant un appartement d’attique en duplex, vient s’accorder au gabarit de l’immeuble situé au numéro 122 (datant de 1896), tandis que l’extrémité ouest, en retrait de la rue, s’aligne à l’immeuble établi au numéro 140 (datant de 1920) ; un passage cocher dessert la maison située au numéro 124 (datant elle aussi de 1896) et établie en bordure du jardin Historische Tuin Schoonoord , au sud de l’immeuble.

Perspective pour un immeuble à appartements à Rotterdam

Cet hôtel résidentiel – comme la quasi-totalité des autres immeubles de ce type – bénéficie d’une situation particulière, ici : la vue remarquable sur le jardin historique voisin, ainsi que le dégagement offert en direction du Land van Hoboken .

Au regard de la morphologie du site, la digue sur laquelle s’établit la rue Westzeedijk, qui constitue une protection, à l’ouest de la ville de Rotterdam, contre les eaux de la Nieuwe Maas [Nouvelle Meuse], offre aussi à l’architecte l’opportunité d’un dénivelé qu’il va mettre à profit dans la composition de son bâtiment. Ainsi, l’immeuble conçu par Frans Lourijsen s’établit-il contre cet ouvrage d’art. Profitant du dénivelé de cette digue, que complète une légère surélévation des paliers des entrées par rapport à la chaussée, il parvient à dégager, à l’arrière du bâtiment, la hauteur d’un étage, ce qui permettra d’éclairer naturellement le sous-sol de l’immeuble, et de le desservir côté jardin.

Organisés sur quatre niveaux, les 24 appartements du complexe sont desservis par trois cages d’escaliers comportant chacune un ascenseur. Depuis la rue Westzeedijk, il est à remarquer que l’on accède à ces cages d’escaliers par un hall d’entrée doté d’un sas que précède un perron. Chacun de ces perrons a fait l’objet d’une décoration artistique particulière, réalisée par le sculpteur Johan Coenraad (dit Jan) Altorf (1876-1955). Cet artiste, originaire de La Haye, a souvent collaboré aux projets de Frans Lourijsen. Ainsi intervint-il, à La Haye, sur l’immeuble sis 9-34, rue Jozef Israëlsplein (1925-1926), sur celui sis 1-27, rue van Zaeckstraat (1928), et enfin sur celui situé aux numéros 56-60, rue van Hogenhoucklaan (1930).

Dans ces quatre ensembles résidentiels, son intervention est similaire : au droit des entrées, un bestiaire stylisé, sculpté en bas-relief dans les angles de grandes et épaisses dalles de pierre placées verticalement de part et d’autre du perron, semble habiter les seuils et accompagner de leur présence le franchissement de ceux-ci.

Entrée du numéro 128 de la rue Westzeedijk à Rotterdam ; les sculptures sont l’œuvre de l’artiste Jan Altorf (1876-1955)

Si, au moment de la livraison, la quasi-totalité des appartements proposés avait été louée, cela peut être corrélé au fait que cet immeuble – comme tous ceux de ce type construits aux Pays-Bas – fût conçu comme une alternative à la propriété privée qui proposait, aux résidents choisissant ce mode de vie, les meilleurs équipements et services que l’époque puisse alors offrir : des appartements de 3, 4 ou 6 pièces à vivre (8 pièces à vivre pour le duplex du dernier niveau de la partie est, au numéro 126 de la rue Westzeedijk) tous alimentés en eau courante (froide et chaude) toute l’année, munis de prises électriques dans chaque pièce, pourvus d’un chauffage central et d’une cheminée dans la pièce principale, d’une ligne téléphonique, d’une cuisine équipée (comprenant : vide-ordure, réfrigérateur électrique, planche à repasser, etc.), d’un WC séparé, d’une salle de bain avec baignoire encastrée, lavabo et bidet pour la chambre principale (les autres chambres étant, pour la plupart, équipées de cabinets de toilette) 11.

Rez-de-chaussée (source : revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928)

En complément d’un loyer annuel (compris entre 2 100 et 3 850 florins 12), pour une somme modique, les propriétaires d’automobiles pouvaient encore disposer d’un garage, chauffé, éclairé, équipé d’un point d’eau et d’une fosse de travail pour la mécanique 13.

Si la consommation d’électricité était à la charge des locataires, elle l’était de manière ajustée, l’immeuble étant équipé de compteurs électriques individualisés. Les réparations éventuelles des conduites électriques ou des alimentations en eau étaient, quant à elles, à la charge de la société Nederlandsche Flatbouw Maatschappij (maître de l’ouvrage, demeurant propriétaire de la construction) ; celui-ci assurait également l’entretien et la propreté des cages d’escaliers et ascenseurs, des jardins (avant et arrière), ainsi que le nettoyage de l’ensemble des baies vitrées de l’immeuble, etc.

Des chambres d’hôtes (logeer kamer ) autonomes pouvaient être mises à la disposition des résidents pour leurs invités (en complément du loyer et au gré des besoins). Six chambres satellites de ce type – d’environ 10 m² chacune – étaient ainsi proposées dans cet immeuble, accessibles directement depuis les paliers, au premier étage ainsi qu’au troisième.

Premier et troisième étages (source : revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928)

Mais une autre particularité de cette résidence équipée se situe dans l’organisation de son sous-sol, qui – comme évoqué ci-avant – est éclairé naturellement en façade sud et s’ouvre sur le jardin et – au-delà – sur l’espace paysager Historische Tuin Schoonoord .

À ce niveau les cages d’escaliers sont reliées par un long corridor central (centrale gang ), permettant ainsi au personnel de maison, employé par la société Nederlandsche Flatbouw Maatschappij , et affecté à la vie de cet ensemble résidentiel, de répondre aux demandes et besoins des locataires des 24 appartements. Le concierge et la direction étaient installés dans la partie est de ce niveau ; contiguë, se trouvait la pièce dédiée au personnel, directement accessible depuis la cour située à l’arrière du bâtiment, en contrebas de la digue. Immédiatement à côté, toujours en façade, à l’arrière des cages d’escaliers correspondant aux entrées des numéros 126 et 128, prenait place une vaste cuisine centrale (centrale keuken ), dotée d’une office (dienst kamer ) et d’une plonge (spoel kamer ).

Sous-sol (source : revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928)

Ainsi, s’il était loisible de préparer des repas dans la cuisine équipée de chaque appartement, était-il également possible de les commander. Ces repas étaient alors confectionnés par le personnel de service, livrés aux horaires souhaités, dans la vaisselle des locataires, au moyen de monte-plats individuels. Les plans montrent vingt-quatre monte-plats flanquant les escaliers et reliant ainsi directement l’étage de service aux appartements ; à la fin des repas, la vaisselle pouvait être retournée à la plonge pour y être nettoyée avant d’être restituée, propre, aux locataires.

Ce qui est ici à relever comme un changement notable dans la relation des résidents à la domesticité est, d’une part, la mutualisation de celle-ci au sein de l’immeuble où cohabitent plusieurs foyers, et, d’autre part, l’évolution du personnel de maison, qui – dans cette configuration – acquiert peu à peu un statut d’employé, travaillant selon des plages horaires définies. Ainsi, pouvait-on, par exemple, lire dans des articles publiés dans la presse spécialisée de l’époque – qui s’est fait le relais du projet –, que le personnel affecté à l’immeuble pouvait être, moyennant un salaire fixe, et à certaines heures seulement, à la disposition des occupants 14.

Par la coprésence au sein de l’immeuble de services mutualisés et d’un personnel dédié, les appartements individuels, juxtaposés, autonomes et équipés, en se liant à un espace technique spécialisé, se muent en autant de lieux de vie confortables – voire attentionnés – qui font de cet hôtel résidentiel un ensemble de maisons combinées. Un sentiment de confort d’autant plus grand peut être ressenti par les résidents qui ont le choix de solliciter ces services communs ou de vivre de façon complètement indépendante les uns par rapport aux autres et de ne pas percevoir la multiplicité des foyers réunis sous le même toit. Ici, lorsqu’on vit en appartements, on vit entièrement dans sa propre maison 15.

En outre, cet immeuble emprunte aussi au modèle de la maison ses espaces de rejet (caves, remises, celliers, débarras, etc.) qui sont autant d’endroits qui contribuent à augmenter le confort de l’habitation en permettant de se départir – ne serait-ce que pour une saison – d’objets devenus temporairement encombrants. Ainsi, ici, comme dans la plupart des habitations individuelles, les locataires de cette résidence pouvaient-ils également ranger, au sous-sol, leurs divers objets dans autant d’espaces affectés et accessibles depuis la cour : un local pour les bicyclettes (rijwielen ), une bagagerie pour l’entreposage de malles (koffer kamer ) ou encore de petits espaces de stockage individualisés et verrouillables pour remiser des effets personnels (bergigen ) ; un coffre-fort était également prévu pour les objets de valeur (safe ).

Si on ne trouve pas mention, dans les plans de cet hôtel résidentiel, de chambres de bonnes, cela est encore à rapprocher de l’évolution du statut des employés de maison. La conception de cet immeuble n’intègre ainsi pas la domesticité en la fondant parmi les espaces de la maisonnée ou en la reléguant dans les parties les moins nobles du bâtiment, mais fait une place à des lieux de travail nécessaires au fonctionnement d’un ensemble résidentiel offrant des services à ses locataires. L’immeuble, duquel disparaît l’idée même d’un étage noble, acquiert ainsi une dimension mixte, car il réunit des espaces résidentiels et des espaces clairement définis comme des lieux de travail, sans rapport de hiérarchie. À la lecture du plan du sous-sol, on remarque que le confort des employés a également été considéré dans ce programme : une salle du personnel a été ménagée (kamer personeel ), ainsi que des sanitaires et douches séparées (douche kamer personeel ).

Un dernier dispositif de service, qui se lit sur les documents graphiques, peut être encore évoqué : la présence d’un placard relais-dépôt à double ouverture, positionné au niveau de l’entrée de chaque appartement. Accessibles par les locataires depuis l’intérieur et, réciproquement, par le personnel de service depuis les paliers des escaliers, ce placard relais-dépôt permet tout type de livraisons ou de services. À titre d’exemple, si des chaussures étaient placées, le soir, dans ce réceptacle, elles pouvaient être récupérées, le lendemain, nettoyées, cirées et lustrées. Au-delà de cette prestation interne à l’immeuble, ce dispositif de placard-palier pouvait également servir à des fournisseurs extérieurs, sollicités directement par les locataires.

Deuxième et quatrième étages (source : revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928)

Dans ce projet, tout a été pensé pour proposer un maximum de commodités et d’avantages, dépassant, à certains égards, ceux de la maison individuelle. Dans un bref article consacré à cet immeuble, le journal De Maasbode résumait ainsi la vie dans cet hôtel résidentiel : tout le monde est au service de l’habitant 16.

D’une écriture moderne à certains égards et, cependant, mâtinée d’éléments hérités du XIXe siècle bourgeois : portes d’entrées en bronze, escaliers en marbre, alliés à des châssis de fenêtres en acier, cette construction s’inscrit, à Rotterdam, dans les tendances et les évolutions de son époque (évolutions artistiques, architecturales ou techniques, mais aussi sociales). Conçu et réalisé en maçonnerie de briques porteuses (matériau de construction national et, dans le même temps, support d’une expression architecturale avant-gardiste), l’immeuble dessiné par Frans Lourijsen intègre des parties construites en béton armé, employé pour l’ensemble des planchers 17. Recouvert de parquet, de linoléum ou carrelé, l’ensemble des sols a été mis en œuvre de manière à ce que les transmissions sonores soient atténuées entre étages.

L’ensemble des services proposés aux locataires de l’hôtel résidentiel, ainsi que les moyens techniques et constructifs mis en œuvre, concourent à rendre agréable la vie de chacune des familles locataires, même si celles-ci, durant cette période de l’entre-deux-guerres sont amenées à vivre au sein d’une unité de voisinage élargie. Ainsi, l’ère bourgeoise – favorable à la présence des domestiques pour le seul confort d’une famille propriétaire des lieux – amorce-t-elle, ici, une évolution vers la modernité urbaine. La réunion de plusieurs foyers au sein d’un même immeuble et la mutualisation des services et prestations rompent avec les us et coutumes d’antan. La condition de certaines personnes change, le travail acquiert une autre valeur, le rôle de l’employé se spécialise et une forme de communauté commence à se constituer entre tous les occupants du lieu, dans laquelle les rapports hiérarchiques évoluent. Si cette évolution est profitable pour les employés qui gagnent en indépendance, elle l’est également pour les résidents, qui voient les contraintes et les charges domestiques s’alléger, tout en bénéficiant d’un accès démultiplié à certaines facilités, pour autant qu’ils acceptent un confort mutualisé. Certains prospectus du début du siècle 18, publiés par la société Nederlandsche Flatbouw Maatschappij , mentionnent, en complément des avantages et commodités déjà évoquées, les économies réalisées par la forme locative, notamment : sur les salaires, la nourriture, la blanchisserie, les pourboires d’un ou plusieurs domestiques, sur la consommation de charbon et d’eau, sur l’abonnement téléphonique, sur l’éclairage des couloirs et des escaliers, sur l’entretien du jardin, sur le coût du ramonage des cheminées, sur l’entretien de la maison, sur la taxe foncière et l’assurance incendie, etc. L’accent est également mis sur le personnel disponible en ces lieux : concierge, électricien, veilleur de nuit, liftier et ouvrier.

Durant la période de l’entre-deux-guerres, face à la pénurie de logements, ce programme résidentiel participera à faire le passage de la domesticité à la prestation de services mutualisés, mais aussi de la villa individuelle, ou l’hôtel particulier, à l’immeuble collectif urbain.

Aujourd’hui, certains de ces hôtels résidentiels ne fonctionnent plus tout à fait selon le modèle qui a présidé à leur conception, tout en restant des lieux d’habitation (immeubles résidentiels, ou résidences de standing, pour certains) ; d’autres (comme si cette typologie d’immeubles, créée au début du XXe siècle, devait faire face à une sorte d’obsolescence) ont été convertis en immeubles tertiaires.

Pour autant, ne pourrait-on recueillir quelques leçons de ces réalisations bâties au tournant de la Modernité ? L’adaptation, aujourd’hui, de tels immeubles, conçus à l’origine comme des équipements domestiques, n’est-elle réellement possible qu’au prix de l’évaporation du programme qui les a fondés, qui ne laisserait ainsi que surfaces libres ? Ne serait-il pas possible d’envisager l’actualité de ce programme moderne ? Ne pourrait-on pas réfléchir à d’éventuelles transpositions du programme initial, pour tenter de répondre à certains besoins contemporains ?

Efficience et prolongements

Une des particularités de ces hôtels résidentiels tient à leur implantation dans l’agglomération urbaine. La proximité des réseaux de transports en commun fut souvent – pour ne pas dire généralement – un aspect décisif dans le choix de leur localisation, de manière à permettre aux locataires de se rendre aisément en ville et bénéficier des services qui y sont implantés (commerces, soins, etc.) ; inversement, en cas d’impossibilité de déplacement, les livraisons pouvaient alors se présenter comme une alternative simple et efficace.

Si l’objectif de mutualisation des services offerts dans ces ensembles résidentiels a eu pour corollaire de réduire l’isolement de leurs habitants, on ne peut désormais considérer ni cet objectif, ni ce qu’il a induit, comme obsolètes, tant la nécessité du maintien des échanges entre les individus demeure fondamentale, du point de vue social, économique ou environnemental. Cette nécessité semblant même être une tendance se renforçant proportionnellement au phénomène de métropolisation.

Par ailleurs, il est aussi à relever que la création de ces hôtels résidentiels (par le regroupement des unités de vie, plutôt que leur étalement) aura permis une utilisation raisonnée du sol ; la mutualisation proposée par le projet de l’architecte Frans Lourijsen, construit entre 1928 et 1930 à Rotterdam, aura ainsi contribué à la préservation d’éléments paysagers, dont la présence – réciproquement – participera à la valorisation du contexte même des habitations construites.

Vue du jardin et des garages de l’hôtel résidentiel Westzeedijk , à proximité de l’espace paysager Historische Tuin Schoonoord, situé au sud de l’immeuble

Un autre facteur significatif au regard du confort des résidents se trouve dans le nombre d’appartements réunis (24 au total pour le cas de l’immeuble de Rotterdam). L’échelle de cet ensemble résidentiel peut alors l’inscrire sans heurt dans le contexte bâti existant et contribuer à la fabrication du tissu urbain avec lequel elle établit des rapports ténus ; la taille modeste d’une telle unité de voisinage aura également permis de mutualiser des services et d’équiper le lieu, en même temps que de préserver l’intimité et l’indépendance de ses habitants.

Intimité, accueil et services paraissent composer un triptyque qui résume ces programmes d’habitations de l’entre-deux-guerres. L’intimité est garantie par des choix typologiques ou des techniques constructives ayant trait aux problèmes acoustiques ; l’accueil se lit dans la composition des espaces domestiques proposés ou dans l’offre de pièces satellites indépendantes (logeer kamer ), accessibles depuis les paliers ; les services se comprennent par l’organisation du sous-sol et la présence du personnel dédié à la vie domestique de cet immeuble.

Pensés pour une frange, certes, aisée de la population des agglomérations, ces hôtels résidentiels apparaissent aussi à même de contribuer à aiguillonner certains codes sociaux, en rompant quelque peu avec des rapports hiérarchiques hérités, sans pour autant renoncer à maintenir des services qui se muent alors en prestations de services. Par la professionnalisation des tâches, à travers la reconnaissance d’une activité et l’allocation d’un salaire par lequel les individus gagnent en autonomie et en liberté, l’incidence d’un tel programme semble aussi avoir des effets sur le tissu social. Et l’on pourrait s’autoriser à penser que le modèle dont sont issus ces hôtels résidentiels fût aussi sous-tendu par un dessein visant à l’amélioration de la cohésion entre individus, quelles que soient leurs positions ou leurs activités dans la société.

Si ce programme a pu se présenter comme une alternative à la villa individuelle, ou à l’hôtel particulier, il a aussi ouvert à des manières d’habiter nouvelles en ce début de XXe siècle et, plus particulièrement, au sortir de la Première Guerre mondiale. En effet, l’hôtel résidentiel Westzeedijk, même s’il s’adressait à une population privilégiée de la ville portuaire de Rotterdam, n’affiche pas un luxe ostentatoire. Aussi, la comparaison de cet exemple avec le type (connu) de l’hôtel de rapport ne saurait être réellement éclairante pour comprendre ce programme qui émerge avec la Modernité, car les services offerts concernent essentiellement la vie quotidienne et ses besoins les plus élémentaires (manger, se tenir au propre, etc.) et le caractère luxueux des hôtels particuliers, ou des hôtels de rapport, ne pèse pas ici. En revanche, le caractère fondamental des services offerts par l’hôtel résidentiel Westzeedijk et la souplesse permise par sa typologie mêlant appartements, pièces satellites appropriables, espaces et services partagés, pourraient être mis en relation avec des usages aujourd’hui émergents, car ils confèrent à cette réalisation une actualité à même d’ouvrir des perspectives et de nourrir la réflexion sur les besoins contemporains en matière d’habitation.

Une étude attentive des typologies auxquelles ce programme a donné lieu, qui envisagerait la dimension spatiale des services proposés, leur combinaison au sein de l’immeuble et les qualités et usages qui en résultent, pourrait alimenter la conception de lieux adaptés à des besoins contemporains, qui demeurent fondamentaux. S’intéresser au programme lui-même, eu égard à l’échelle des immeubles réalisés (à La Haye comme à Rotterdam, voire ailleurs), leurs situations urbaines et leurs services mutualisés, permettrait d’envisager son application, son appropriation, à une autre réalité. L’enjeu pourrait être de raviver ce programme, en envisageant sa transposition à d’autres groupes de personnes, à d’autres situations de vie, en interrogeant son efficience et sa capacité à répondre à des problématiques sociales émergentes ou – pour certaines – récurrentes.

Aussi, sur le modèle de l’hôtel résidentiel de la rue Westzeedijk à Rotterdam, ne pourrait-on imaginer un lieu de vie pour des personnes en convalescence, ayant besoin de soins ou simplement d’attention ? Sur la base de l’organisation spatiale de ce type d’immeubles urbains, ne pourrait-on imaginer un lieu de vie pour des personnes en situation de handicap, ou vieillissantes, dépendantes ou non, mais en quête d’autonomie en même temps que de relations sociales ?

Semblerait-il incongru que la typologie proposée par l’architecte Frans Lourijsen, puisse aujourd’hui être adaptée en lieux de vie équipés et autonomes pouvant accueillir des personnes en formation, pour lesquelles ils constitueraient un hébergement temporaire, ou transitoire, et dans lequel l’installation serait facilitée par les services intégrés à l’immeuble ? Ne pourrait-on aller jusqu’à imaginer prendre appui sur l’étude de ces réalisations de l’entre-deux-guerres, pour élaborer des programmes mêlant la diversité de ces profils (voire d’autres) et auxquels pourraient encore être incorporés des appartements dédiés à des familles pour lesquelles les prestations de services à domicile représenteraient indéniablement un bénéfice significatif ?

Pourquoi ne pas imaginer que les expériences architecturales antérieures – qui constituent une base éprouvée par le vécu – ne puissent être ravivées, ou renouvelées, et offrir un socle à la réflexion en direction de réponses adaptées aux problématiques d’habitat contemporaines ?

Si les architectes néerlandais, il y a un siècle, ont su comprendre des demandes, intégrer des persistances, tout en combinant des problématiques sociales et économiques de l’époque pour les traduire dans des expériences architecturales qui ont aussi tiré parti de la technique, il semble qu’il serait aujourd’hui loisible d’envisager poursuivre cette histoire, toujours à l’œuvre.

Entrée du numéro 126 de la rue Westzeedijk à Rotterdam ; le séjour de chaque appartement du rez-de-chaussée donne accès à un jardin privatif, à l’avant de l’immeuble

 

  1. N.V. Nederlandsche Flatbouw Maatschappij, ou Nederlandsche Flatbouw Mij. dans sa version abrégée, [Compagnie d’immeubles résidentiels néerlandais] est le maître de l’ouvrage (privé) de cette opération. L’acronyme N.V. correspond à Naamloze vennootschap que l’on pourrait traduire, en français, par Société anonyme.
    Le directeur de la société Nederlandsche Flatbouw Maatschappij s’appellait L.M.M. Delboy. retour
  2. Le Rotterdamsche Kring [Cercle de Rotterdam] était une association culturelle et intellectuelle qui organisa, de 1913 à 1942, à Rotterdam, dans ses locaux de la rue Eendrachtsweg, de nombreuses conférences, débats, concerts, séances de cinéma, etc. Certains habitants de la ville de Rotterdam, comme le banquier Rudolf Mees (1880-1951) – à l’initiative de la création de cette association culturelle – pensaient qu’il était nécessaire de contrebalancer le penchant matérialiste de cette ville d’affaires. retour
  3. Nous renvoyons ici au journal De Maasbode paru le 11 janvier 1928 et plus particulièrement à l’article intitulé Causerie over Flatbouw [Causerie sur l’immeuble d’appartements], relatif à l’immeuble résidentiel Westzeedijk construit à Rotterdam. Selon cet article, c’est sur les conseils de quelques habitants et sur la base du succès obtenu avec les immeubles de La Haye que la construction de cet immeuble d’appartements eut lieu dans la ville portuaire de Rotterdam. retour
  4. De la courte vie de Franciscus Lodewijk Johannes (dit Frans) Lourijsen, décédé à l’âge de 44 ans, on ne sait que peu de choses, bien que ses réalisations se distinguent, comme peuvent en témoigner les relais qui en furent faits à l’époque dans la presse. Nous renvoyons par exemple au périodique Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , organe de presse – entre 1924 et 1938 – de l’Institut néerlandais des architectes (N.I.V.A.) ou encore à la presse locale (Nieuwe Leidsche Courant , De Maasbode , par exemple) qui a relayé les projets ou les réalisations de certains immeubles résidentiels. retour
  5. Nous pouvons citer le complexe d’habitation Papaverhof construit à La Haye en 1922 et composé de maisons unifamiliales (source : Het Nieuwe Instituut, Rotterdam. <https://zoeken.hetnieuweinstituut.nl/nl/personen>), ainsi que l’immeuble d’appartements situé, dans la même ville, à l’angle des rues Jozef Israëlsplein, Jozef Israëlslaan, Mauvestraat et bâti en 1925-1926. retour
  6. Toute personne prenant part au milieu artistique peut être membre de la Haagse Kunstkring  : architectes, photographes, musiciens, sculpteurs, écrivains, peintres, etc. retour
  7. La publication en série intitulée : Moderne Bouwkunst in Nederland (éditée par W.L. & J. Brusse N.V., à Rotterdam), paraîtra entre 1932 et 1935, sous la direction de : Hendrik Petrus Berlage, Willem Marinus Dudok, Jan Gratama, Allard Remco Hulshoff, Herman van der Kloot Meijburg, Jan Frederik Staal et Julius Luthmann, secrétaire. retour
  8. Cette typologie paraît naître, aux Pays-Bas, au sortir de la Première Guerre mondiale ; vers 1930, un nombre important d’immeubles de ce type peut être identifié à La Haye. Sans prétendre être exhaustif, nous pouvons citer : l’immeuble Boschzicht , situé à l’angle des rues Benoordenhoutseweg (numéros 24-39) et Neuhuyskade (numéros 2-30) et construit par les architectes Willem Verschoor (1880-1968) et Cornelis Rutten ( ?- ?) entre 1919 et 1920 ; l’immeuble de 32 appartements Zorgvliet , situé aux numéros 1-91 de la rue Alexander Gogelweg et construit en 1923-1927 par l’architecte Adolf Broese van Groenou (1880-1961) et A. Alberts (ingénieur ?) ; l’immeuble Cats’ Heuvel construit en 1928 au numéro 125 de la rue Catsheuvel par les architectes J.J. Groenema ( ?- ?) et L.M. van den Berg ( ?-1952) ; l’immeuble Nirwâna (numéro 227 de la rue Benoordenhoutseweg) construit en 1929 par les architectes Jan Duiker (1890-1935) et Bernard Bijvoet (1889-1979), associés à l’ingénieur Jan Gerko Wiebenga (1886-1974) ; l’immeuble Duinwyck , situé au numéro 350 de la rue van Alkemadelaan, construit en 1929-1932 par les architectes J.J. Groenema et L.M. van den Berg ou encore l’immeuble Oldenhove , situé aux numéros 50-52 rue Laan van Meerdervoort et conçu entre 1928 et 1931 dans le style de l’Amsterdamse School par l’architecte Philip Anne Warners (1888-1952). Ces adresses sont localisées sur le plan de la ville de La Haye, en illustration de cet article. retour
  9. Prospectus betreffende het Flatgebouw ‘van Hogenhoucklaan’ – ’s-Gravenhage [Prospectus concernant l’immeuble d’appartements ‘van Hogenhoucklaan’ – La Haye]. retour
  10. Cette construction fut toutefois conçue en collaboration avec l’architecte Jan Wils. retour
  11. Ces informations sont extraites de la revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928, qui a publié un article présentant cet immeuble ; les dessins qui illustrent ce paragraphe en sont extraits. retour
  12. Ce montant est mentionné dans l’article intitulé Causerie over Flatbouw [Causerie sur l’immeuble d’appartements], paru dans le journal De Maasbode , publié le 11 janvier 1928.
    Selon le Bulletin de la Statistique générale de la France (Tome XVII – Fascicule III, avril-juin 1928), au marché des changes en janvier 1928, le cours à Paris pour 100 florins est en moyenne de 1 025,99. À cette époque 2 100 florins valent donc 21 545,79 francs et 3 850 florins valent donc 39 500,615 francs. Selon l’INSEE, compte-tenu de l’inflation et du passage des anciens francs à l’euro, le montant de 21 545,79 francs (valeur 1928) correspondrait, environ, à la somme de 13 128,27 euros (valeur 2015) ; le montant de 39 500,615 francs (valeur 1928) correspondrait, environ, à la somme de 24 068,50 euros (valeur 2015). retour
  13. Ces équipements sont évoqués dans l’article paru dans la revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928. retour
  14. Ce point est mentionné dans l’article de la revue Bouwbedrijf : waarin opgenomen Bouwen , datée du 13 avril 1928. retour
  15. Extrait d’un article relatif à l’immeuble résidentiel Westzeedijk , intitulé Causerie over Flatbouw [Causerie sur l’immeuble d’appartements] et paru dans le journal De Maasbode , le 11 janvier 1928. La traduction proposée dans le texte est celle des auteurs. retour
  16. Article intitulé Causerie over Flatbouw [Causerie sur l’immeuble d’appartements], paru dans le journal De Maasbode , le 11 janvier 1928. La traduction proposée dans le texte est celle des auteurs. retour
  17. À l’issue d’un appel d’offre, le soumissionnaire ayant remis le prix le plus bas pour les travaux de béton armé fut la société Rijnlandsche Beton Mij . [Compagnie des bétons de Rhénanie], basée dans la ville de Leyde au nord-est de La Haye, pour un montant de 50 300 florins (source : journal De Maasbode daté du 9 mai 1928).
    Selon le Bulletin de la Statistique générale de la France (Tome XVII – Fascicule III, avril-juin 1928), au marché des changes en janvier 1928, le cours à Paris pour 100 florins est en moyenne de 1 025,99. À cette époque 50 300 florins valent donc 516 072,97 francs. Selon l’INSEE, compte-tenu de l’inflation et du passage des anciens francs à l’euro, le montant de 516 072,97 francs (valeur 1928) correspondrait, environ, à la somme de 314 453,41 euros (valeur 2015). retour
  18. Par exemple : le Prospectus betreffende het Flatgebouw ‘van Hogenhoucklaan’ – ’s-Gravenhage [Prospectus concernant l’immeuble d’appartements ‘van Hogenhoucklaan’ – La Haye] ; cet immeuble d’appartements a été réalisé en 1930 par l’architecte Frans Lourijsen. retour